Ateliers de la Terre: la position de l'Afrique à Copenhague, espoir et fermeté
20 nov. 2009Après le Forum mondial du développement durable à Ouagadougou en octobre 2009, The Global Conference organisée par les Ateliers de la Terre en novembre 2009 à Deauville rassemblait plusieurs délégations africaines*, des industriels, chefs d'entreprises, politiques, chercheurs, et représentants de la société civile. Ces délégations ont rappelé d’une seule voix la gravité des impacts du changement climatique déjà constatés sur le continent, et leur ampleur avec quelques exemples frappants: réduction de la surface du lac Tchad passée de 25.000 Km2 en 1960 à 2.500 Km² aujourd'hui avec des conséquences incalculables sur la pluviométrie au Sahel et sur la faune, la flore et les populations du Lac Tchad, érosion côtière du Maroc à l’Afrique du sud, inondations dévastatrices à Ouagadougou , Cotonou, Grand-popo et Athiémé etc, plantes invasives dans le fleuve Niger entraînant une baisse de rendement des barrages hydrauliques …
Ils ont fait état aussi de l’inadéquation des mécanismes mis en place dans le cadre de l’accord de Kyoto, des PANA (plans d’adaptation) et des MDP (Mécanismes de Développement Propre) dont moins de 2% des projets labellisés à date concernent l’Afrique, contre 73% pour l’Asie.
Ils ont également rappelé la difficulté de trouver des financements pour des projets aussi ambitieux et cohérents que celui de la Grande Muraille Verte, un projet de reforestation de Dakar à Djibouti, traversant 11 pays en vue d'atténuer l'avancée du désert et aujourd’hui porté sur des fonds propres en particulier du Sénégal.
Dans ce contexte, l’intervention du Ministre d'Etat français Jean-Louis Borloo venu rappeler les axes du plan "Justice Climat" qu’il va défendre à Copenhague, était particulièrement attendue. Car, au constat de la vulnérabilité du continent africain, s’ajoute enfin la reconnaissance du potentiel immense de l’Afrique dans la lutte mondiale contre le changement climatique aves ses ressources en énergies renouvelables, ses surfaces forestières (les forêts du bassin du Congo constituent le deuxième bloc forestier tropical au monde et le premier pour la bio diversité), ses ressources humaines et culturelles peu exploitées.
Le ministre français a évoqué avec la ferveur qui caractérise souvent son expression, que l’Afrique pouvait être considérée comme un continent neuf, qui pouvait prendre le leadership d’un mode de production et de consommation totalement repensé, intégrant l’éco système au lieu de l’épuiser. Et de ce fait, contribuer avec ses propres forces à maîtriser le déséquilibre climatique en cours, en cohérence et non plus en opposition, avec les efforts des pays occidentaux, qui reconnaissent leur responsabilité dans la situation actuelle.
Dans ce forum, les délégations africaines ont donc rappelé qu’elles vont à Copenhague pour la première fois parler d'une seule voix. Leurs propositions sont claires et reposent sur leur propre expertise. Elles sont conscientes de la composante stratégique de cette réponse de l’Afrique et notamment des convergences des solutions entre énergie, agriculture et industrie.
Mais les leçons tirées de Kyoto, expliquent la fermeté des pays africains: ils ne signeront l'accord politique que s'il est accompagné de mécanismes satisfaisants, simples à mettre en œuvre, favorisant l'investissement privé, et financés sur des fonds additionnels.
L’enjeu de Copenhague est vital pour la planète, il est aussi une formidable opportunité de faire entendre la voix africaine dans les grandes négociations internationales en faisant reconnaître le biotope africain comme un bien public mondial.
Tous nos vœux et nos efforts convergent vers cet objectif, dans cette course contre la montre qui engage dès aujourd’hui, et non à la génération suivante, le sort de nos populations africaines et par la même occasion la population mondiale.
* Senegal, Mali, Côte d'Ivoire, Burkina Faso, Togo, Bénin, Centrafrique, Niger, Congo, Tchad, Maroc, Algérie...